Poèsie- art
La peur et l'ignorance
La peur et l’ignorance
Deux sœurs issues d’un même lit
Deux faces d’une même pièce
L’une suggère, l’autre agit
Leurs marraines se nomment détresse et faiblesse
Leurs rejetons s’appellent superstition, intolérance
Colère, souffrance, haine, soumission, déviance
Toujours ensembles main dans la main
Elles s’incrustent et s’infiltrent en profondeur
Elles chassent le bonheur matin après matin
Elles brisent alentour élans, promesses et cœurs
Invincibles, discrètes, elles habitent notre ombre
Patientes, silencieuses, elles ont tout notre temps
Nourrissant nos pensées les plus sombres
Les habitants et les renouvelants indéfiniment
Immortelles ; de nos naissances s à nos morts, nous les portons
Aujourd’hui, semons pour demain : combattons-les
Opposons leur la foi, la force, la conscience, la compassion
Affrontons-les ; traquons-les, aux creux de nos recoins les plus secrets
Si nous ne pouvons les faire taire ; alors crions plus haut, plus loin, plus fort
Notre Vérité, inaliénables, debout et ancrés, face au monde
Quittons le quai, laissons loin derrière l’illusion de la brume des ports
Entrons joyeusement dans le Cercle, chantons et dansons notre ronde
Demeurons libres et vivants au cœur de nos divinités ; éternels insoumis
Refusant le joug de ces deux catins marquées du sceau de l’infamie
Conscients de leurs présences mais désormais immunisé s contre leur venin
Portés par l’AWEN ; nous serons ce que nous devons être, ni plus mais ni moins
Brigantia
O Brigantia
Tu as en toi la force de la vie naissante
Les vertes promesses de la nature ardente
A ton contact la femme devient féconde
Tandis que la vie reprend sa ronde
Tu réveilles la terre encore hésitante
Tu recolores l’aube au gout de menthe
Tu accueilles la vie qui grouille et gronde
Tu es là où, de nouveau, frémit l’onde
De la qualité de nos rimes soit la garante
Guéris nous par la boue et les plantes
Qu’à nos suppliques toujours tu daignes répondre
Pour qu’en paix, au petit matin, la grive ponde
Sur une terre redevenue clémente
Souffle la vie sur les crêtes et les pentes
Pour que partout les bourgeons abondent
Un frère part
Un frère part …
Aujourd’hui, un frère part
Pour que la mémoire guide nos pas,
A l’imparfait ou plus que parfait.
Ce soir, dans le vent, est sa demeure.
Ce matin le temps renaît.
A son crépuscule les arbres pleurent ;
A son aurore, le ciel fût grêlé.
Au creux des mousses du mont Beuvray,
Un frère reposera sous les trois rais.
Grogne qu’en grogne dans la futaie
Poussière d’étoile et senteurs ambrées
Aujourd’hui, un frère est parti,
Nouveau tour de roue vers la vie.
Du passé de souveraineté il fût l’archer
Décochant la flèche d’un futur ensemencé ;
Pour qu’en nous vibre la Tradition païenne ;
Qu’en nos âmes lustrées coule l’AWEN
Aujourd’hui un frère est parti
Cheminer seul sous les buis
A jamais fils de l’infini.
Bon voyage l’ami
Brestos
J'aperçois dans tes yeux
J'aperçois dans tes yeux
J'aperçois dans tes yeux le rêve et le mystère:
Regardes-tu le ciel ensemencer la terre ?
Comme on voit les chardons éparpiller leur graine,
La neige tourbillonne au travers de la plaine.
J'aperçois dans tes yeux le doute et l'espérance:
Ecoute tu le vent qui siffle dans les branches ?
Comme on entend gémir un chien contre la porte,
Le nouvel an demande accueil ; sa mère est morte
J'aperçois dans tes yeux l'angoisse et l'épouvante :
Regardes-tu trembler la flamme de la lampe
Comme une âme de deuil qui souffre et qui palpite,
Le Destin indécis autour de nous hésite.
Ah ! regarde mes yeux qui sont loyaux, écoute
Battre mon coeur fidèle et sois près de moi toute !
Comme des laboureurs très pauvres que nous sommes,
Il nous faut dans le vent sarcler le champ des hommes.
Naîtra-t-il des épis, des chardons ou des ronces ?
Que l'amour de tes yeux me donne la réponse !
Philéas LEBESGUE
Mes bois
Mes bois
Forêts de mon pays, sources à l'ombre, feuilles
Bruissantes au moindre vent,
Retraites d'écureuils, abris d'oiseaux fervents,
En vous mes songes se recueillent.
Dans mon coeur ombragé de ses mélancolies,
En gouttes de flamme, au matin,
Jusqu'au gazon mouillé filtre le soleil fin,
Que les violettes supplient.
Par toutes vos senteurs, vos parfums, vos murmures,
Par vos frissons toujours nouveaux
De plantes, d'ailes, d'élytres, de fines eaux,
De bourgeons ouverts, de rainures,
Vous m'avez enseigné les songes éperdus,
Le vertige d'amour suprême;
Mes désirs ont été la ruche qui essaime
Vers vos ombrages attendus.
Là, toute femme est nymphe ou déesse.
Vous fûtes
Les tendres complices du Sort.
Avec vous je perdais l'angoisse de la mort,
Le souci cuisant des minutes.
O grands bois indulgents, vous incliniez sur nous
Vos têtes qui sèment de l'ombre.
L'amour a fui.
Au creux de vos retraites sombres,
Mes songes restent à genoux.
Philéas LEBESGUE